Fran Garigol était arrivée en Russie il y a très longtemps ; elle y était restée, tombée sous le charme de Varikino, à l’Ouest du pays. Elle y habitait un beau quartier, riche, où la grande façade de marbre blanc de l’Hôtel de ville reflétait le soleil du matin ; en toute saison Varikino semblait baigné d’une lumière neigeuse, le marbre, voyez vous produisant dans ces régions cette sorte d’effet apaisant. A Varikino donc : larges trottoirs et allées de grands tilleuls, à la berlinoise, on ne se refuse rien.
Oui mais, c’est curieux, à Varikino, poussettes et landaus sont interdits.
Voici pourquoi. C’est que Fran Garigol s’était à ce point attachée à son cher Varikino qu’au moment de lui léguer la grande fortune qu’elle avait construite à partir de son atelier de sucre d’orge, et bien elle avait édicté : c’est moi qui paye : pas de landau, les enfants, d’accord, mais pédibulés, c’est la moindre des choses. Les édiles s’étaient rendus aux raisons trébuchantes de la grande Francesca et avaient fait de cette marotte de leur bienfaitrice un argument touristique supplémentaire : à Varikino, on fait de nos enfants des piétons, des promeneurs, des flâneurs dès leur plus jeune âge. Grandis, ils font ainsi de très compétents baladeurs, furtifs et curieux, de très attentifs et discrets arpenteurs de notre belle ville. Et, puisqu’ils ne sont plus, dans le même mouvement, dévolus à la roulette et à l’ordre marchand qu’elle-la roulette-favorise immanquablement, ils sont moins travailleurs, certes, moins boulot-boulot si l’on veut, mais qui s’en plaindrait ? Qui peut prétendre que notre ville n’a pas gagné au change ? Et Fran Garigol avait la vieillesse satisfaite et heureuse qu’elle méritait, ayant participé de première main à l’édification d’une Varikino nouvelle, une ville de grands tilleuls et de marbre laiteux, lente si lente/piétonnante/nonchalente/flânante…
Oui mais, c’est curieux, à Varikino, poussettes et landaus sont interdits.
Voici pourquoi. C’est que Fran Garigol s’était à ce point attachée à son cher Varikino qu’au moment de lui léguer la grande fortune qu’elle avait construite à partir de son atelier de sucre d’orge, et bien elle avait édicté : c’est moi qui paye : pas de landau, les enfants, d’accord, mais pédibulés, c’est la moindre des choses. Les édiles s’étaient rendus aux raisons trébuchantes de la grande Francesca et avaient fait de cette marotte de leur bienfaitrice un argument touristique supplémentaire : à Varikino, on fait de nos enfants des piétons, des promeneurs, des flâneurs dès leur plus jeune âge. Grandis, ils font ainsi de très compétents baladeurs, furtifs et curieux, de très attentifs et discrets arpenteurs de notre belle ville. Et, puisqu’ils ne sont plus, dans le même mouvement, dévolus à la roulette et à l’ordre marchand qu’elle-la roulette-favorise immanquablement, ils sont moins travailleurs, certes, moins boulot-boulot si l’on veut, mais qui s’en plaindrait ? Qui peut prétendre que notre ville n’a pas gagné au change ? Et Fran Garigol avait la vieillesse satisfaite et heureuse qu’elle méritait, ayant participé de première main à l’édification d’une Varikino nouvelle, une ville de grands tilleuls et de marbre laiteux, lente si lente/piétonnante/nonchalente/flânante…