quand on est emportée
par le fleuve on est
quoi on est
fleuvée fluvée fluviatée
qu’on s’y laisse aller
(dans les poches des pavés)
alors on est on est
beneflotillée fluidisolomascarée mélancolifiumée
que le fleuve emporte tout on est
quoi on est
[vous avez compris que notre langue de noyée
est agglomérative et ne fait pas grand cas des verbes d’action]
fluvitourbillée plongeodéshalée potamosubmercoulée
et la sensation de l’eau noire sur la poitrine
du froid du bruit du bouillon d’ondine
quoi cette sensation quoi océnanesque
angstrivoyeuse blackhydrochillante pectaquafriesque
et la racine ancienne quoi
‘se laisser aller à un fleuve de larmes’
l’eau dedans l’eau partout lacrymaquoi
dacryosuicide autolacrymothanasie nostalgocaletocharme
et ces langues qui s’emboitent pour dire
‘on se trempe jamais deux fois l’baigneur
dans le même nauséabond collecteur’
l’égouraclitisme stinky-styx-neveragain bismorbidopotamire
et la succion marécageuse la tristonsse
quand on s’engloutit qu’on s’enfonce
on laisse aller la plongée le noyage
lypépaludognathe quicksandsovore ristolimniphage
à la fin on est quoi
on est
emportée
emportée à la fin
coda (pour ne pas conclure) : vous savez bien que ‘le mot rivière n’est pas noble en poésie’ (encycl. Diderot)