[Le fugu est un poisson mortel, au bec coupant comme celui d’un perroquet. Il est tigré et visqueux, sa chair est translucide et peut conduire, suivant la préparation, à l’extase ou à la mort. Un jésuite vient à passer (c’est leur métier).]
Le fugu : En colère, je me gonfle [et il est vrai que notre poisson, disant cela, prenait un air important]. Au fond de mes couilles, dans mon foie : un poison deux cent mille fois plus violent que le curare. Mais, voyez à quoi tiennent les choses : je suis par ailleurs un plat raffiné, de grand prix, et on me prépare avec force précausion. Voyez à quoi tient le plaisir…
Le jésuite qui passait par là : Bof. Bof, bof, bof. L’amanite des Césars est mortelle quand l’oronge, sa soeur qui lui ressemble, est délicieuse. Je ne vois là qu’une morale de champignon et pas de quoi déranger la métaphysique, si vous voulez mon avis, ad majorem fungi gloriam…Orgueil de fugu, orgueil de rien du tout, je sais de quoi je parle, c’est mon métier…Et vous voyez que cette alternative de la mort et de l’extase à quoi vous voulez nous réduire, est très banale…