Reçu cette semaine (mi-avril 2012) par l’intermédiaire bienveillant de Christine Guilfoyle, un tirage original (14,5×25,3 cms) signé de cette photographie de Nelson Algren, par Art Shay. Art Shay est le grand témoin du Chicago de Nelson Algren, ville que les deux bonhommes ont prise par des bas fonds qu’ils connaissaient bien, et appréciaient ; ils voulaient tirer de leurs balades un livre, qui ne s’est pas fait. Ces déambulations informées (et documentées) datent des années 49-mid 60’s ; en 1951, Algren en fera le très fort poème en prose, Chicago : city on the Make , augmentation et transformation d’un article de 1951 pour le magazine Holliday.
Christine Guilfoyle est lancée dans un travail universitaire à propos de Nelson Algren ; pour ses recherches, elle est entrée en contact avec notre famille : elle avait trouvé que BelleMaman avait bien connu Nelson, poker, courses, night life amicale et littérature et voulait en savoir plus. Nous lui avons ouvert la belle correspondance entre Joan Ballard et Nelson et, après quelques conversations où elle avait compris que j’aime la bicyclette et ses représentations, Christine avait promis de s’entremettre auprès d’Art Shay pour m’obtenir cet émouvant tirage. Et Art Shay, puisqu’il apprécie son travail et qu’il ne sait rien lui refuser, s’est très aimablement exécuté.
Cette photographie n’est pas inédite, qui a servi de couverture aux récits de voyage de Nelson Algren publiés sous le titre de Algren at Sea, travel writings [Seven Stories Press, 2009, inédit en France.] Mais l’image a été recadrée, et inversée, perdant dans la manoeuvre ce qui en fait le charme dérisoire : le plan large choisi par Art Shay est bien meilleur : Nelson y est paumé dans son grand Chicago de briques, accroupi sur un pauvre et petit vélo de rencontre pour satisfaire à la demande de son ami photographe et en plus, il flotte et il faut pédaler dans les flaques. Nelson en vélo, quelle blague et il n’y croit pas, pourquoi pas Mitchum en trottinette, aussi ? Même veste militaire, mêmes lunettes, même coupe de cheveux : il apparaît qu’Art Say a tiré de cette même balade la couverture de son Nelson Algren’s Chicago [University of Illinois Press, 1988] : on remarque les mêmes fines gouttelettes, sur le même regard ennuyé (et amusé) de Nelson.
Chicago était la ville de Nelson Algren ; quand il l’a quitté pour le New Jersey, personne n’a compris, et dans cette vidéo, on entend très nettement les ricanements amicaux de Studs Terkel, qui connaissait bien son Algren à la seule évocation de Paterson (N.J. donc) dont Nelson prétendait qu’elle était ‘his kind of town…’
Salut Art Shay, salut Christine,
salut Nelson, salut BelleMaman, et en plus, il flotte (lundi 16 avril 2012.)