17 janvier 2006. Levé tôt, déjà plusieurs cafés, pas place Pigalle puisque tout est fermé, mais plusieurs allers-retours dans les bistrots du quartier pour m’occuper en attendant l’heure du bus. Puis attente à l’arrêt du 67 sous la pluie, pas d’abri, en compagnie d’un type assez costaud, capuchonné, annoraké, basketté de blanc, 30/40 ans, une espèce de forme sans visage, main dans les poches. Arrive le bus. Je prend le type à témoin, gentiment et sur le ton de la râlerie complice, pour lui dire que le chauffeur pourrait bien nous ouvrir maintenant, au lieu d’aller inspecter sa machine (c’est le départ de la ligne). Il se tourne vers moi et me répond d’un sourire (il est grand, noir, au visage plutôt mou), et dit : « non non on on… ». On monte ; il reste debout, près de la porte de sortie ; moi, plutôt vers l’arrière. Deux autres passagers : un petit chauve-rasé, bien mis, strict, piercing dans le pavillon de l‘oreille et un costumé aux chaussures très pointues. Nuit, silence. D’un coup, le grand type de l’arrêt se lance en avant, sans rien dire, revient en arrière, vaste amplitude des mouvements du buste raidi, très rapides penchements en avant, encapuchonné. Grognements : « on on on … ». Et toujours la capuche sur les yeux. Ça dure un grand moment, jusqu’à Saint Georges, où il descend. Toujours le silence du bus, nuit matinale. Amusé, effrayé.