Samedi 23 mars 2013, vers une heure, en remontant la rue Férou (Paris VIe arrondissement), j’avise un vieil homme courbé qui descend vers Saint Sulpice ; il marche lentement et rien ne devrait le signaler à mon attention si ce n’est une imposante croix de métal portée en pendentif. Fait-il partie de cette famille de cinoques souvent rencontrée, celle des ‘pélerins’, les prédicateurs égarés, les illuminés ? Curieux, je ralentis : cheveux ras, courte barbe blanche, chemise, lunettes, costume sombre ; la croix est belle, très ouvragée, mains dans les poches de sa veste, pantalon trop court, chaussures de marche. Au moment où il me croise, je l’entends dire d’une voix sourde et saccadée : ‘…on y va//on y va//lâche ça…’ : je le suis ; il cesse de se parler quand d’autres passants arrivent à sa hauteur.
Le cinoque pélerin entre à Saint Sulpice et prend, sans changer d’allure, l’allée centrale : signe de croix rapide devant l’autel. Puis il entre dans la sacristie, sur la droite, petite porte ; il y est bien accueilli d’un sourire avenant qui lui demande des nouvelles ; il prend le temps de répondre (je ne distingue pas ce qu’il dit) et reste planté un court instant devant la très aimable gardienne à qui il semble familier. Mais je le perd de vue très rapidement : il s’est glissé par une porte basse que je n’avais pas vue ; cette porte est vitrée, je vois donc mon cinoque qui s’éloigne dans un long couloir où il déambule plus lentement ; il a relevé la tête.