Turin, le jeudi 22 novembre 2012 vers cinq heures et demi, rue San Dalmazzo. Cette rue du centre est assombrie et commence sous des arcades, temps doux ; nous marchons lentement, Jenny à mon bras, fatigués par une très longue journée de balade. Mais très vite : cris violents derrière nous, tout près ; on se retourne et changeons très vite de direction, traversons la rue, peu fréquentée à cet endroit ; Jenny s’est crispée, inquiète : un jeune type très nerveux, mince, habillé de sport, blouson molletonné et jean, crie donc, marche vite, sautille, se cambre et frappe soudain très fort sur le capot d’une voiture proche. Jenny veut s’éloigner encore mais je nous force à l’arrêt pour observer ce jeune type, qui va très mal. Il est brun, cheveux plaqués, visage émacié, aux gestes saccadés. Deux jeunes filles s’écartent et se réfugient sur le pas de porte d’une boutique ; il s’arrête et passe un grand moment agenouillé à arranger sa courte chaussette qu’il peine à ajuster à sa basket ; il continue à crier, à voix aiguë, quelque chose que je ne peux comprendre ; il se relève d’un saut, et file dans une rue à gauche. Nous restons plantés sur notre trottoir ; on l’entend crier encore un long moment.