Vendredi 11 mai 2012, cinq heures, au restaurant Mc Donald de la place Pigalle, où je viens de manger une glace au caramel. En sortant, je remarque très vite une femme assez âgée qui se tient assise sur la droite, à une table proche de la porte d’entrée. Je m’arrête sur le boulevard, de l’autre côté de la vitrine pour vérifier si elle est bien aussi agitée qu’il m’est apparu de premier abord ; je suis ainsi placé à moins d’un mètre d’elle, sans qu’elle puisse me voir. Et : elle est agitée, indéniablement : vêtue d’un béret bleu de laine tricotée porté très en arrière sur de longs cheveux blancs mal coiffés et passés derrière l’oreille, elle parle seule, secouée de mouvements de tête véhéments ; ses mains aux très nombreux bijoux sont décharnées, ses ongles longs sont sales ; elle se lèche les doigts très souvent, puis se peigne une moustache prononcée, dans le coin de la bouche, sous un petit nez court ; elle est vêtue d’une veste de skai, d’une jupe imprimée et de bottes. Elle remue les épaules d’avant en arrière et plonge la main droite dans une de ses bottes, pour se gratter longuement cheville et mollet. Puis elle se gratte les aisselles. Elle ne cesse pas de se parler. Coincé contre la vitrine : un petit parapluie rose ; sur la table un grand café et les restes d’une pâtisserie. Je tente de la photographier par dessus mon épaules par un dispositif discret de mon phototéléphone mais n’aboutit à rien, reflets et cadrage pitoyable ; je perds trop de temps à la manoeuvre et reprend bientôt mon observation notante. Elle a dans les poches de vieux journaux repliés, papiers divers débordants et entre ainsi dans la famille des cinoques lecteurs, ou collecteurs. Rien ne change : elle se gratte l’épaule, s’agite, parle sans qu’on ne perçoive grand chose, se lèche les doigts, se penche en avant, agite les épaules, se parle et déplace son grand gobelet vide, revient se gratter sous les aisselles, se parle, s’agite…Je stoppe assez vite mes notations.