Mercredi 8 juin 2011, vers 6 heures, comme je pioche mes mots croisés à la terrasse du pub qui fait face à la gare de Valence, atmosphère tranquille et attentive (pour moi, at ease)+une bière quand un cri -quelque chose comme HENRI, d’une voix très nette, qui appuie sur le I-me fait lever la tête et me signale sur le parvis de la gare un type déjà rencontré, que j’ai appelé ici ‘Johnny’ pour sa manière de s’habiller de rock et de western. Il est vêtu d’un impeccable blouson blanc à capuche, d’un jean et de chaussures de marque ‘converse’ ; il est encore coiffé de sa drôle de houpette teinte de blond, sur des cheveux courts et se tient appuyé à un bac à arbustes, façon courbe et très déhanchée, très instable en tous cas : comme il boit au goulot d’une bouteille (que je vois pas bien, bière ou thermos) ce mouvement du cou lui fait une silhouette comiquement prognathe et oui, c’est bien ça : à chaque rencontre avec Johnny, je dois bien noter qu’il s’affaisse, une prostration rapide qui le ralentit et semble le pousser vers un silence nouveau : avant il braillait parfois ses refrains préférés (le feuuu le feuuu le feuuu) et s’agitait au centre ville. Maintenant il est traînant, ou immobile. Comme là, il boit le plus souvent, installé en ville, aux points de fort passage, avec pas mal de bière ; il n’est pas ivre, propre toujours. Quel âge ? Quarante ou cinquante, sans qu’on puisse vraiment dire et préciser. Mais Johnny (ou Henri ) ne répond pas à l’appelant d’en face, qui n’insiste pas, accoutré gypsy et chapeau de cuir, fines moustaches et bagues à tous les doigts, bijoux nombreux +une bière, lunettes noires très enveloppantes. Encore un signe de la main ; Henri ne vient pas.