Mercredi 17 décembre 2010, autour de midi, tout à fait en bas de la rue Mouffetard (Paris Ve). Je suis au Starbuck du carrefour, où je compte profiter des toilettes mais où je dois faire la queue aux caisses tant l’affluence est grande, public de jeunes filles téléphonantes. J’ai très envie de pisser, ce qui me rend impatient et vient même de provoquer ma fuite de la bonne librairie qui est située en face. La séquence bistrotière que je voudrais idéalement dérouler est donc la suivante : commande d’un café, installation, toilettes, café et Tweetage, retour rapide vers la librairie en question. Mais trop de monde : nervosité. Qui ne m’empêche pas de remarquer un jeune type longiligne et barbu, à la longue doudoune noire et aux étranges lunettes fumées inappropriées (quand j’en parlerai plus tard à Jenny elle m’apprendra que ces lunettes sont dites “wrap-around”) mais très à la mode. La vérité, c’est que je l’ai reconnu : il vient comme moi de la librairie d’en face. Et là bas je l’avais surpris à un drôle de manège dialogué avec le libraire. Libraire : ” mais, Monsieur, je viens de vous le montrer, le rayon religion…” Jeune type : “Oui, mais j’ai oublié”. “C’est là, voilà Monsieur, la religion et là, c’est le judaïsme”. De la main ouverte, le libraire balaye les rayonnages concernés, situés au fond de la boutique mais, indifférent à ces explications Doudoune fiche le camp en silence à l’opposé du rayon qui devait l’intéresser. Il y a foule, le libraire se montre excédé. C’est le même Doudoune qui est maintenant au Starbuck où il m’a précédé de peu. Moi, je m’agite et sens bien que mon observation ne pourra durer bien longtemps ; je songe déjà aux toilettes du café “Verse toujours”, tout proche, sans doute plus accessibles. Doudoune se balance d’un pied sur l’autre ; il enlève ses lunettes et fixe attentivement un jeune couple qui passe commande. Jean étroit, chaussures strictes, il semble planté là, sans consommation. Il murmure quelque chose pour lui seul et hoche la tête. Je veux partir et équipe mon téléphone pour une photographie ( qui sera tout à fait floue et inutilisable ici) qui me servira de prises de notes, ambiance, couleurs, clientèle…Je ne peux plus attendre et file à “Verse toujours”.