Lundi 15 novembre 2010, dans le tram, entre la Porte d’Ivry et la Porte d’Orléans, Paris. Il est à peu près neuf heure et demi, je suis assis face à un asiatique qui téléphone en riant le plus souvent et un Noir trentenaire et lecteur de l’Equipe. Ces deux là ne sortent pas de leur occupation du moment. Voyage détendu, glissement du tram ; à la station Montsouris monte un très jeune type, qui s’installe près de moi. Rien à signaler, jean basket, parka sportive, le tout impeccable et neuf. C’est un lycéen, reconnaissable à son sac à dos appendiculaire. Sauf qu’il a des ongles très longs, très longs et très soignés, c’est ça qui me le signale, et des mains très fines et blanches. Il se regarde les ongles, les observe en pivotant lentement les mains ; examen patient. Son walkman est très emmelé, il entreprend d’en défaire les noeuds ; il se sert du bout de ses ongles, dans un geste très précieux, et assez lent, mais efficace. Il a des cheveux très longs, sans coupe, et mal lavés, gras. Ses cheveux lui font comme une protection devant le visage ; ils tombent en rideau, vraiment très longs, sous le nez, épais. Du bout des doigts, il réinstalle ses cheveux, comme s’il réarrangeait un masque ; il semble se cacher là-derrière. J’aperçois tout de même une fine moustache adolescente, de celles qui n’ont jamais été rasées. Il renifle fréquement en se tenant le nez avec l’index et le majeur, qui pressent les ailettes du nez, au dessus des narines. Rien ne le distrait de ces attentions à lui-même.