Mardi 2 mai 2017, place de la Bastille. Je descends du train ; je viens de la gare de Lyon et me dirige vers Saint Paul, où je dois retrouver Suzanne. Forte voix éraillée avant de traverser le boulevard Henry IV : un type braille avec de grands gestes, sans que je perçoive bien ce qu’il dit ; je sors mon téléphone ; il se retourne brusquement : je prends la photographie qu’on voit ci-dessus, sans qu’il s’en rende même compte. Je note à la volée, sur un coin de mon journal : ‘…les gamins, ils les attrapent et ils vont les égorger dans les bois…les arabes, les arabes…enculé de sa race…’ Édenté, démarche saccadée, lourd bagage à roulette. Il continue de crier en traversant le boulevard ; je le suis, mais ne perçois rien distinctement. Il entreprend le kiosquier de la place ; j’entends : ‘les magasins arabes, ils sont pas touchés…’ Le kiosquier sourit, pas affolé.