A Lyon, au métro Part Dieu, au changement à Charpennes, jusqu’à la station Hôtel de ville, le 23 janvier 2015, je voyage très près d’un homme de quarante ans, très agité au visage très vieilli. Il a constament le même geste de se frotter vigoureusement le visage, les yeux et les joues surtout, de la paume des mains, doigts très écartés, longtemps, avec insistance. Ce n’est pas un massage ; il ne se fait pas du bien. Puis les cheveux, longs et propres, avec un geste de se recoiffer en arrière.
Il est vêtu d’une parka sportive taillée beaucoup trop grand ; il m’évoque un footballeur yougoslave tombé dans la débine. Yeux très rentrés, petits, fatigués. Au changement, je le suis avec difficulté ; il marche vite, très courbé ; il est souple. A la station Charpennes, il s’isole dans le couloir des ascenseurs pour compter ses ronds au creux de la main. Plusieurs fois. Il se parle, à mi-voix ; sérieux. Pendant le reste du voyage, ses voisins, quand ils ont pu remarquer ses frottements répétés, prennent peur et s’écartent.