Vendredi 2 décembre 2011 au métro Madeleine (Paris, France) dans cette partie nouvelle et impeccable de la ligne 14. Je rentre au village et tire avec application ma lourde valisaroulettes ; je suis très très en avance, comme il convient ; je flâne. Dans le couloir de la correspondance-toute de marbre pavée- on a astucieusement disposé des pièces de plastique qui figurent des empreintes de pas : ça doit nous guider, n’est ce pas, ne pas se perdre, mettre nos pieds là où il faut, c’est idiot et me suis toujours demandé si c’était bien utile (la marche à suivre…) mais bon pas à un enfantillage près. C’est donc chiffré ‘12’ et permet de remonter- moi je vais dans l’autre sens- vers la ligne Nord Sud, la ligne 12 en question. Du plastique vert, de pointure moyenne. Près des escaliers mécaniques un type est plié en deux, jambes raidies, position de danseur, pieds écarts, dos plat et visage à une trentaine de centimètres du sol : il fixe la fausse trace de pas et n’en bouge pas ; il tapote le pied vert du bout de l’index recourbé et semble s’appliquer sur le chiffre 12, dans une considération lente et posée. Ça dure : il était là quand j’ai pris le couloir ; il n’abandonne sa position étudiante que lorsque j’arrive à son niveau : c’est un jeune Noir au grand nez et au visage calme qui indique bien qu’il vient de faire ce qu’il convenait (opine avec sérieux, résolution argumentée d’un problème) ; il est mince, vêtu de sport et ajusté ; il file avec souplesse et légèreté.